Le rover Perseverance de la NASA vient d’atteindre une nouvelle zone sur Mars qui pourrait contenir certaines des roches les plus anciennes et les plus intéressantes de la planète rouge. Cette découverte marque une étape importante dans la mission de recherche de traces de vie passée sur Mars.
Une nouvelle étape dans l’exploration martienne
Le rover Perseverance a parcouru beaucoup de chemin depuis son atterrissage dans le cratère Jezero (large de 45 kilomètres) en février 2021. Sa mission principale reste la recherche de signes de vie passée sur Mars et la collecte d’échantillons destinés à être rapportés sur Terre.
Après plus de quatre années d’exploration, le robot de la taille d’une voiture vient d’atteindre un nouveau site fascinant : un plateau d’affleurements rocheux que l’équipe de mission a baptisé Krokodillen, d’après une crête montagneuse située sur l’île norvégienne de Prins Karls Forland. En norvégien, Krokodillen signifie tout simplement « crocodile ».
Ce plateau, qui s’étend sur environ 30 hectares, représente une frontière entre les roches anciennes du bord du cratère Jezero et les plaines au-delà. Les travaux préliminaires suggèrent que cette zone contient des minéraux argileux, qui se forment en présence d’eau liquide – un élément fondamental pour la recherche de traces de vie.
Des roches parmi les plus anciennes de Mars
« Les roches de Krokodillen se sont formées avant la création du cratère Jezero, durant la période géologique la plus ancienne de Mars, le Noachien, et comptent parmi les plus vieilles roches de Mars », a expliqué Ken Farley, scientifique adjoint du projet Perseverance au California Institute of Technology de Pasadena.
L’intérêt scientifique de ces formations est majeur. « Si nous trouvons une potentielle biosignature ici, elle proviendrait très probablement d’une époque entièrement différente et bien plus ancienne de l’évolution de Mars que celle que nous avons découverte l’année dernière dans le cratère avec ‘Cheyava Falls' », a ajouté Farley.
Pour rappel, Cheyava Falls est une roche en forme de pointe de flèche que Perseverance a étudiée en 2024. Le rover y avait détecté des signatures chimiques et des structures compatibles avec l’activité microbienne ancienne. Mais ces caractéristiques pourraient aussi avoir été produites par des processus géologiques, ce qui explique pourquoi elles restent des biosignatures potentielles plutôt que définitives.
Une stratégie d’échantillonnage adaptée
Face aux découvertes prometteuses et aux contraintes matérielles, l’équipe de Perseverance met en œuvre une nouvelle stratégie d’échantillonnage. Le rover laissera désormais certains de ses tubes nouvellement remplis non scellés, afin de pouvoir vider les échantillons collectés en faveur d’autres potentiellement plus intéressants si besoin.
Cette approche s’explique par le fait que Perseverance dispose de moins en moins de tubes non scellés et qu’il lui reste encore beaucoup de terrain passionnant à explorer.
Le rover transporte 43 tubes, dont 38 sont destinés à la collecte d’échantillons (les cinq autres sont des tubes « témoins » conçus pour aider l’équipe à déterminer si les matériaux des échantillons contiennent des contaminants terrestres).
Un bilan impressionnant après quatre années d’exploration
À ce jour, Perseverance a rempli tous ses tubes d’échantillonnage sauf sept, selon Katie Stack Morgan, scientifique par intérim du projet Perseverance au Jet Propulsion Laboratory de la NASA en Californie du Sud.
« Nous explorons Mars depuis plus de quatre ans, et chaque tube d’échantillon rempli que nous avons à bord a sa propre histoire unique et captivante à raconter », a-t-elle déclaré. « Cette stratégie nous offre une flexibilité maximale alors que nous poursuivons notre collecte d’échantillons de roches diverses et fascinantes. »
Les échantillons collectés par Perseverance pourraient un jour être ramenés sur Terre pour être étudiés dans des laboratoires bien équipés à travers le monde. Cette analyse approfondie pourrait nous aider à répondre à l’une des questions les plus fondamentales : la vie a-t-elle existé ailleurs que sur Terre ?
Les défis de la mission Mars Sample Return
Malgré l’importance scientifique des échantillons collectés, l’avenir de la mission Mars Sample Return (MSR) reste incertain. Le budget proposé par l’administration Trump pour 2026 pourrait annuler le plan actuel de retour des échantillons collectés par Perseverance.
Une telle décision aurait des conséquences majeures pour la recherche de vie extraterrestre, car confirmer la présence de vie passée ou actuelle sur Mars pourrait s’avérer une tâche trop complexe pour Perseverance seul, étant donné sa charge scientifique limitée.
Parmi les découvertes récentes notables de Perseverance et d’autres rovers martiens :
- La détection de centaines de formations ressemblant à des « œufs d’araignée » dont l’origine reste mystérieuse
- La mise en évidence de processus essentiels au maintien de la vie
- La découverte par Curiosity des plus longues chaînes de carbone sur Mars dans une roche vieille de 3,7 milliards d’années
L’importance géologique de Krokodillen
Le plateau Krokodillen représente une opportunité unique d’étudier les conditions qui régnaient sur Mars il y a des milliards d’années, durant l’ère Noachienne. Cette période, qui s’étend de 4,1 à 3,7 milliards d’années, est considérée comme la plus propice au développement potentiel de la vie sur Mars.
Si Perseverance découvre davantage de minéraux argileux à travers Krokodillen, cela suggérerait que la zone pourrait avoir été habitable il y a très longtemps. Les argiles se forment généralement en présence d’eau liquide stable, un élément clé pour l’apparition de la vie telle que nous la connaissons.
- Les minéraux argileux préservent souvent les signatures moléculaires de l’activité biologique
- Les roches du Noachien pourraient contenir des traces de la vie martienne la plus primitive
- L’étude de ces formations pourrait nous éclairer sur les processus qui ont façonné la planète rouge
L’exploration de ce plateau représente donc une étape cruciale dans notre compréhension de l’histoire géologique et potentiellement biologique de Mars, ouvrant une fenêtre sur une période où la planète rouge était peut-être bien plus semblable à la Terre qu’elle ne l’est aujourd’hui.